Souvenir de récit:
Dans ce livre plusieurs récits se succèdent et s'imbriquent les uns dans les autres. L'ensemble forme une architecture mystérieuse parcourue par des humains étrangers les uns aux autres. Dans un des récits, un homme s'enferme par inadvertance dans un lieu secret, souterrain et trop bien caché; l'homme n'a prévenu personne de son départ et de son intention de se rendre dans cet inaccessible sous sol. La vie des autres personnages continue à se développer mais l'homme demeure enfermé; on se prend à espérer que quelqu'un viendra au secours de l'homme enfermé mais c'est impossible puisque personne ne sait qu'il est là. A aucun moment il n'est apporté de solution au cas douloureux du prisonnier. La vie des autres continue toujours dans le livre et la certitude que l'homme est condamné à une terrible mort loin de tout et de tous, sans le moindre soutien, habite peu à peu le lecteur. La présence de l'homme prisonnier au cœur du livre donne une perspective particulière à tout ce qui y est raconté. Le cas sans solution du prisonnier est comme une épine plantée au centre de l'esprit du lecteur. Sa conscience se scinde: d'un coté l'horreur de savoir l'homme condamné et de l'autre le défilement du récit. La conscience humaine ressemble à cela: d'un coté, une perception aiguë de l'horreur se déroulant quelque part dans le monde, de la finitude et de l'autre la conscience utile du flux quotidien, qui nous porte et nous maintient ici et maintenant.